Qu’ont en commun le violon, le piano, le dulcimer, le violoncelle et la guitare ? Ce sont tous des instruments à cordes qui ont une table d’harmonie en épicéa. Cette fine plaque fait vibrer l’air, alors seulement pouvons-nous entendre la musique. Aucune autre essence ne possède d’aussi bonnes caractéristiques sonores que l’épicéa.
L’épicéa offre la meilleure combinaison de légèreté, de fermeté et d’élasticité du bois. Mais tous les épicéas ne conviennent pas à la fabrication d’instruments. Même dans les régions où les forêts sont potentiellement propices, seul un épicéa sur mille est sélectionné comme bois de résonance.
Rare combinaison de caractéristiques
La raison : Les exigences pour l’épicéa, qui pourrait un jour devenir un instrument, sont élevées. Une bûche ne doit pas avoir de branches dans sa partie inférieure, ne doit pas être tordue et doit avoir une croissance régulière derrière elle, c’est-à-dire présenter des cernes annuels de largeur égale.
La nature combine très rarement ces trois caractéristiques en un seul tronc. Les épicéas de bois de résonance se trouvent entre 1100 et 1600m au-dessus du niveau de la mer et presque uniquement dans des peuplements forestiers orientés au nord. Le climat frais permet aux arbres de survivre aux années les plus sèches sans une réduction notable de leur croissance.
Spécialité doublement précieuse
Le produit forestier haut de gamme qu’est le bois de résonance est également intéressant d’un point de vue économique. Il atteint des prix au moins trois à quatre fois supérieurs à ceux du bois de construction, tout en conservant des quantités gérables. La recherche et la commercialisation du bois de résonance apporte donc des avantages tant pour les forêts privées que pour les forêts publiques.
La prise en compte des aspects qualitatifs favorise la force d’observation et stimule la motivation pour un tri plus efficace du bois, ce qui génère des revenus supplémentaires. Mais la valeur ajoutée du bois de résonance va bien au-delà de l’aspect matériel. En tant qu’exclusivité de la forêt de montagne, elle renforce son image ainsi que celle des entreprises qui savent l’extraire et la transformer.
Beaucoup de bois sain reste méconnu
Selon des estimations prudentes, il y a cependant beaucoup plus de bois sain dans les forêts de montagne suisses que ce qui a été utilisé, trié et vendu jusqu’à présent. Chaque année, environ 1500-3000 m3 de bois sont vendus comme bois de construction et donc bien en dessous de leur valeur. Les revenus qui en découlent peuvent être obtenus par les autorités forestières entrepreneuriales et les administrateurs forestiers qui s’intéressent à un produit de niche à valeur ajoutée culturelle.
Pour ce faire, il est nécessaire de former et de perfectionner le personnel forestier et d’obtenir des impulsions des milieux touristiques, qui incluent les forêts de bois de feuillus dans leur offre, mais aussi de soutenir la logistique nécessaire (tri en forêt, vente de bois précieux, transformation locale, promotion des exportations, etc.)
Création de valeur locale innovante
La société Florinett, basée dans les Grisons, montre les possibilités qu’offre le bois de résonance pour la création de valeur locale innovante. Grâce à l’utilisation intelligente des avantages de l’implantation, cette entreprise familiale est devenue en l’espace de dix ans le premier producteur suisse de bois de résonance. Sous le label Tonewood Switzerland, Florinett exporte aujourd’hui dans 40 pays des tables d’harmonie de haute qualité faites du meilleur épicéa.
L’achat nécessaire de 300 m3 de bois d’épicéa de qualité sonore est un immense effort : car il nécessite l’inspection d’environ 40000 m3 de bois d’épicéa avant que les grumes puissent être achetées et traitées avec soin dans la propre scierie de l’entreprise.
Dans le Pays d’Enhaut, haut plateau entre Gruyère et Gstaad, l’apparition du bois de résonance a même conduit à une semaine musicale à Rougemont. Depuis 2001, le festival très animé « Le bois qui chante » s’est développé pendant dix jours. L’événement culturel comprend des concerts, des cours pour petits et grands, la découverte des métiers du bois et, bien sûr, une visite des forêts environnantes.
Philippe Domont, via lignum.ch
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